L'Art est sur l'Image Cinématographique

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lundi 25 février 2013

Critique de Django Unchained de Quentin Tarantino

Un western made in Tarantino
 
 


« Un nouveau pot de peinture rouge sur une pellicule vierge »
 

 
En véritable cinéphile, le réalisateur américain ne pouvait faire autrement que de nous en mettre plein la vue avec cet autre genre, qui vient s’ajouter à sa filmographie. Jonglage connu et reconnu, entre humour et ultra violence, comment s’étonner de tout ce sang visqueux et abondant, qui survole de grandes distances pour repeindre un mur ou enlever la blancheur d’un champ de coton ? En dehors de ce comique de l’absurde, le sang, éclatement des passions, ne peut être que l’expression d’un amoureux du cinéma. Personnages à la fois aimés, aimant, et vengeurs ne demeure pas moins des icônes de la tragédie. Quentin Tarantino à su faire de ces ingrédients, une recette populaire, jouée sur du velours. Quoi de plus excitant, que de voir les minorités, les opprimés et les vies gâchées se rebeller ? Dans ses films, la vengeance semble être un motif de réussite. Comment ne pas accepter qu’un esclave noir veuille se venger de la tyrannie de l’homme blanc, qu’un groupe de résistants juifs veuillent tuer des nazis, que des femmes persécutées aient envie d’en découdre avec leur ravisseur et qu’une femme laissée pour morte et privée de son enfant revienne à la charge ? Il est sans aucun doute, du goût de l’opinion publique, que de mener à bien une vengeance méritée. Le cinéaste balance aujourd’hui entre deux critiques divergentes: un individu qui a trouvé un commerce fructueux ou bien un homme qui prend à cœur la défense des opprimés.

Le débat pourrait durer une éternité, et serait louable sur ces deux points de vue. Est-ce que Django Unchained est l’un de ses meilleurs films ? Telle est la question. Cela reste un jeu plaisant, que de déceler les références qu’il nous offre. Le film est un clin d’œil au Django de 1966 réalisé par Sergio Corbucci dont l’acteur principal, Franco Nero, revient pour une courte apparition (voir photo ci-dessus). Cette référence est révélée dès le générique, à travers la musique originale du film de 1966.
 
 
 
Django Unchained se rapprocherait peut être plus d’un Kill Bill, ou le sang se répand à flots. Par ses zooms rapides sur les visages. Ou encore quand les hors-la-loi arrivent en grand nombre dans la demeure de Candy Land. On ne peut s’empêcher de penser aux « 88 cinglés », passant les portes au rythme d’une chorégraphie bien déterminée. On pourrait voir Django comme un simple recyclage cinématographique, de l’ultra-référence, dans lequel le réalisateur selon certains perdrait en originalité. Christophe Waltz joue ce même homme cynique et imprévisible qu’il fut dans Inglorious Basterds. Si Django Unchained ne gagne pas en originalité, il ne perd pas pour autant en personnalité. Tarantino demeure fidèle à sa position, comme la maison de Candy Land, attendant son spectateur sur la scène finale pour lui servir un « no man’s land » artistique. Finalement, comment ne pas parler d’originalité, quand un genre aussi ancien que le western croise le travail de ce cinéma moderne ? L’adrénaline est intact et le film accompli son coup de théâtre. Le western qu’il soit respecté ou non dans ses codes, devient un excellent prétexte de mise en scène pour le réalisateur. Depuis Inglorious Basterds nous reprochons l’exactitude de l’Histoire. Quentin Tarantino n’a pas pour politique de rendre l’Histoire complètement vraie. D’ailleurs, il ne s’est jamais donné pour principe, de rendre toutes ses mises en scènes réalistes. Il fait du cinéma sans chercher à faire croire au spectateur que ceci à été la réalité. Il mise peut être plus sur l’humour, que sur la violence. Il est un homme qui connaît la scène théâtrale et joue avec l’excitation du public. La musique aussi décalée soit-elle avec le genre, vient embellir l’action. Le sang n’est pas la vraie violence choquante du cinéaste. Elle vient seulement repeindre un lieu, pour changer le décor.

La violence si dure, aux yeux des spectateurs qui ne veulent pas se confronter aux films du réalisateur américain, ne s’explique pas par le sang, ni par le mélange déstabilisant de l’absurde et de l’ultra violence. Elle tient plus du rapport humain, et de l’inévitable. Chacun de ses films est constitué d’une scène très choquante. Entre autre dans Django Unchained, il s’agit certainement du combat à mort entre les deux hommes noirs. Nous pouvons également penser à la scène de l’oreille coupée dans Reservoir Dogs, ou bien à la première séquence d’Inglorious Basterds, dans laquelle il a su y insuffler la « véritable » peur. Ce qui choque n’est pas l’acte, mais le fait qu’on ne peut l’empêcher. Dans la plupart des scénario, un rebondissement est produit, pour éviter aux personnages de mourir atrocement. Chez Tarantino, « la cavalerie » n’arrive jamais. Ce qui doit se produire, ne peut être évité. Et le réalisateur se rapproche certainement de la réalité en faisant cela. Nous savons ce qui va advenir des personnages, ou bien, les violences interviennent sans prévenir. Il est l’un des réalisateurs à détruire l’une des règle du personnage principal, qui est de le faire tenir jusqu’aux dernières minutes du film.  Qui sait ce qui va leur arriver ? Nous sommes comme les spectateurs d’un combat de gladiateurs dans l’Arène. Il ne doit en rester que deux, jusqu’à ce que le public réclame une mise à mort. Quentin Tarantino nous offre ces mêmes jeux et cette même violence. Qu’en est-il du choix d’une mise à mort ? Sans doute que le public qui rejette la violence du réalisateur, est un public qui ne veut pas faire face à ce choix. Rien ne viendra sauver les héros.

Django Unchained commence à sortir de cette règle. Nous ne retrouvons pas autant cet « inattendu ». Cela ne fait pas de ce dernier, un mauvais film. Mais avec du recule, la « trilogie gangsters » (Reservoir Dogs, Jackie Brown et Pulp Fiction) restent probablement les œuvres maîtres du réalisateur. Au-delà de la pure interprétation historique d’Inglorious Basterds, il est difficile de nous faire paniquer plus qu’un colonel Hans Landa. La prestation des acteurs était parfaite. Peut être pas au point de remettre un prix à Leonardo Dicaprio, en attente d’un futur Oscar. Que propose Django Unchained de différent ? Sous quel angle le regarder ?

Comme un « western-spaghetti » moderne dans lequel il est inévitable de dire, que le réalisateur s’est amusé et nous le rend bien.
 
 
 
Rameau Antoine

 

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