Avec
Mommy, le film de Xavier Dolan est une claque monumentale.
Son cinquième film remporte le Prix du Jury lors du Festival de Cannes 2014.
Souvent en compétition à « Un Certain Regard », son travail mérite
toute notre attention. Phénomène ascensionnel du cinéma québécois, élevé au
rang de jeune prodige, Xavier Dolan a réalisé son premier long métrage à l’âge
de 20 ans et devient à 25 ans le plus talentueux de sa génération. Il n’est pas
complètement inconnu du milieu. Il a joué auparavant dans des courts-métrages,
tourné dans des publicités, son père était lui-même comédien chanteur. Bien que
bercé par cet univers, il affirme n’avoir été influencé par aucun cinéaste et qu’il
connait très peu ses classiques. Son inspiration vient plutôt des musiques de
sa jeunesse (Céline Dion).
La B.O participe avec le cadre et l’image à une
orchestration des émotions. Il développe avec justesse les sentiments de ses
personnages mais il expérimente à sa façon différents formats possibles. Le
cinéma devient pour lui, comme pour Jean-Luc Godard, un laboratoire à
exploiter. L’image 1 :1 est alors synonyme d’intimité mais aussi
d’emprisonnement. Entre malaise et tendresse, la réception du spectateur est
ambigüe. Il s’agit d’un regard « voyeuriste », un regard pour juger,
un regard qui nous fait aussi culpabiliser. On va beaucoup plus loin que le film
caricatural et « cultissimement » drôle d’Etienne Chatiliez La Vie est un Long Fleuve Tranquille. Le
milieu populaire de Diane et Steve, sont parsemés d’habitudes et de défauts qui
sont montrés avec humour mais surtout avec amour. Xavier Dolan transmet son
amour pour ses personnages/acteurs, pour ses souvenirs, pour sa passion du
cinéma. Il donne sa définition du mot espoir en ouvrant son format 1 :1
sur un Wonderwall (Oasis) à nous en donner
des ailes. On s’émerveille, puis nous culpabilisons de nouveau quand le format
1 :1 s’impose.
Le drame n’est pas seulement lié au déficit de Steve, mais
surtout au sens du mot communication. Communication qui ne s’exprime pas
toujours avec des mots. Un « code crypté » que seuls Diane et Steve
peuvent échanger, l’amour d’une mère pour son fils, d’un fils pour sa mère. Le
personnage de Kyla est un personnage en mal de communication, expliqué par son
bégaiement. Elle va retrouver le goût de la vie en installant
progressivement une thérapie d’entraide avec Steve.
Coloré, rythmé, hyper
cadré, Mommy est un oiseau qui veut
sortir de sa cage, optimiste dans la conscience d’un monde parfois dur ou
injuste. Il crie liberté, comme un marginal, comme un anarchiste et frappe dans
le cœur du public. Ce même public des années 60-70 en exalte devant les personnages
violents, dans le besoin de secouer le système, de bouger les choses.
Rameau Antoine