L'Art est sur l'Image Cinématographique

Un Blog sur l'analyse filmique et la critique


mardi 12 août 2014

Adieu Professeur Keating !


L'acteur Américain Robin Williams est décédé le 11 août 2014 à l'âge de 63 ans.
 
Il remporte l'Oscar du Meilleur Second Rôle dans Will Hunting, des Golden Globes pour Good Morning Vietnam, Le Roi Pêcheur, Madame Doubtfire, nominé pour Le Cercle des Poètes Disparus...
 
 



 
 
Filmographie
 
 
 
1980 : Popeye de Robert Altman
1982 : Le Monde selon Garp de George Roy Hill
1983 : The Survivors de Michael Ritchie
1984 : Moscou à New York de Paul Mazursky
1986 : La Dernière Passe de Roger Spottiswoode
1986 : Club Paradis de Harold Ramis
1986 : Seize the Day de Fielder Cook
1987 : Good Morning, Vietnam de Barry Levinson
1988 : Portrait of a White Marriage de Harry Shearer
1988 : Les Aventures du baron de Münchhausen de Terry Gilliam
1989 : Le Cercle des poètes disparus de Peter Weir
1990 : Cadillac Man de Roger Donaldson
1990 : L'Éveil de Penny Marshall
1991 : Dead Again de Kenneth Branagh
1991 : Le Roi Pêcheur de Terry Gilliam
1991 : Hook ou la Revanche du capitaine Crochet de Steven Spielberg
1992 : Shakes the Clown de Bob Goldthwait
1992 : Toys de Barry Levinson
1992 : Les Aventures de Zak et Crysta dans la forêt tropicale de FernGully de Bill Kroyer
1992 : Visionarium de Jeff Blyth
1992 : Aladdin de Ron Clements et John Musker
1993 : Les Mille et une vies d'Hector de Bill Forsyth
1993 : Madame Doubtfire de Chris Columbus
1995 : Jumanji, de Joe Johnston
1995 : Neuf mois aussi de Chris Columbus
1996 : Birdcage de Mike Nichols
1996 : Jack de Francis Ford Coppola
1996 : L'Agent secret de Christopher Hampton
1996 : Hamlet de Kenneth Branagh
1996 : Aladdin et le Roi des voleurs de Tad Stones
1997 : La Fête des pères de Ivan Reitman
1997 : Harry dans tous ses états de Woody Allen
1997 : Will Hunting de Gus Van Sant
1998 : Flubber de Les Mayfield
1998 : Au-delà de nos rêves de Vincent Ward
1998 : Docteur Patch de Tom Shadyac
1999 : Jakob le menteur de Peter Kassovitz
1999 : L'Homme bicentenaire de Chris Columbus
2001 : A.I. Intelligence artificielle de Steven Spielberg
2002 : Photo Obsession de Mark Romanek
2002 : Crève, Smoochy, crève ! de Danny DeVito
2002 : Insomnia, de Christopher Nolan
2004 : Final Cut de Omar Naim
2004 : Le Prince de Greenwich Village de David Duchovny
2004 : Noël de Chazz Palminteri
2005 : The Big White de Mark Mylod
2005 : Robots, de Chris Wedge et Carlos Saldanha
2006 : Happy Feet de George Miller
2006 : Camping-car de Barry Sonnenfeld
2006 : The Night Listener de Patrick Stettner
2006 : La Nuit au musée de Shawn Levy
2006 : Man of the year de Barry Levinson
2007 : Permis de mariage de Ken Kwapis
2008 : August Rush de Kristen Sheridan
2008 : Le Psy d'Hollywood de Jonas Pate
2009 : La Nuit au musée 2 de Shawn Levy
2009 : Les deux font la père de Walt Becker
2009 : World's Greatest Dad de Bob Goldthwait
2011 : Happy Feet 2 de George Miller
2013 : Un grand mariage de Justin Zackham
2013 : Le Majordome de Lee Daniels
2014 : The Face of Love de Arie Posin
2014 : The Angriest Man In Brooklyn de Phil Alden Robinson
2014 : La Nuit au musée : Le Secret des Pharaons de Shawn Levy
2014 : Merry Friggin' Christmas de Tristram Shapeero
 
 

vendredi 8 août 2014

Critique et Analyse de Mister Babadook de Jennifer Kent – Presque une anagramme ?

 

Mister Babadook (-12 ans) : 1h32, film d’horreur australien réalisé par Jennifer Kent, sorti le 30 juillet en salles.

Casting : Essie Davis (Amélia), Noah Wiseman (Samuel), Daniel Henshall (Robbie), Hayley McElhinney (Claire)

Le film remporte le prix du jury, le prix du jury jeune, le prix du public et le prix de la critique lors du Festival International du film fantastique de Gérardmer 2014. Il appartient à la sélection « New Frontier »  lors du Festival du film de Sundance 2014. Mister Babadook reçoit de nombreuses critiques positives. Il s’agirait du premier film de Jennifer Kent, tourné avec peu de moyens.

Résumé : Amélia veuve depuis 7 ans, élève seule son fils Samuel qui semble présenter des troubles du comportement. Ancienne écrivain de contes pour enfants, elle découvre un soir pour la première fois, un livre intitulé Mister Babadook. Des évènements obscurs se produisent après la lecture de l’histoire. Comment ce livre est arrivé là ? Pourquoi le Mister Babadook fait son apparition ?



Avis : Mister Babadook est comparé à de récents films comme Insidious ou The Conjuring de James Wan et d’anciens comme Rosemary’s Baby de Roman Polansky. Ces œuvres réinventent à leur manière le style de « la maison du diable » ou les personnages sont prisonniers des fantômes, des sorcelleries et diverses possessions. La maison entièrement coupable des tourments qu’elle fait subir aux personnages est animée par une âme défunte et tourmentée. La plupart du temps, parents et enfants sont confrontés ensemble à survivre aux pressions et aux sévices qui conduisent le spectateur vers la révélation d’un secret ou d’un souvenir enfoui. L’enfant se retrouve souvent au cœur du problème, incarnant l’innocence et renvoyant même au mensonge de ses propres parents. Mister Babadook triomphe car il exploite intelligemment tous les codes de son genre.


Ceux qui l’ont vu : Dans le film nous apprenons qu’Amélia a perdu son mari dans un accident de voiture, le soir où elle allait accoucher de Samuel. On apprend aussi qu’elle écrivait des contes pour enfant. Un beau jour sans raison, ils découvrent le livre de Mister Babadook. On se rend compte que tous les incidents sont plus ou moins liés au père. Le Babadook se sert de lui pour attirer Amélia dans son piège. On peut supposer que le Babadook n’est autre que l’âme maléfique du père. Babadook serait presque une anagramme (en changeant la place des lettres nous obtenons un autre mot ou un autre nom) pour dire Dadabook ou bien Daddybook (le livre de papa). Le livre est probablement une œuvre post-mortem écrit par Amélia afin de faire le deuil de son mari. Elle l’aurait oubliée par la suite. Construit comme un Requiem, Amélia et Samuel prononcent les mots « Ba ba-ba dook dook DOOK » sorte d’incantation. Le monstre est repoussé jusque dans la cave ou gisent un peu partout les souvenirs appartenant au père. Un manteau, des gants et un chapeau, font écho au costume du Babadook.

Si on devait aller plus loin (ce qui risquerait d’être tordu) cette expérience vécue par les deux personnages ressemble au rite du « complexe œdipien » avec le meurtre symbolique du père que doit encore effectuer Samuel.





Rameau Antoine


mardi 1 juillet 2014

NYMPH( )MANIAC – La Provocation à un maître : Lars Von Trier

 

Sorti en salles le 1er Janvier 2014 et réalisé par Lars Von Trier (-16 ans)

Filmographie : Element of Crime (1984), Epidemic (1987), Europa (1991), Breaking The Waves (1996), Idioterne (1998), Dancer in The Dark (2000), Dogville (2003), Five Obstructions (2003), Manderlay (2005), Le Direktor (2006), Erik Nietzsche mes années de jeunesse (2007), Chacun son Cinéma (2007), Antichrist (2009), Melancholia (2011), Nymphomaniac (2013)

Casting : Stellan Skarsgard, Shia Labeouf, Charlotte Gainsbourg, Jamie Bell, Willem Dafoe, Connie Nielsen, Christian Slater, Stacy Martin, Uma Thurman, Hugo Speer, Jens Albinus, Nicolas Bro, Mia Goth, Sophie Kennedy Clark, Udo Kier, Jean-Marc Barr, Shanti Roney, Jesper Christensen.

Œuvre en deux volumes. Initialement le long métrage représentait 5h30 mais le producteur a fait le choix de retirer un total de 1h30. Par la suite cela a donné 2 films. De nombreuses scènes ont été censurées mais le film reste explicite. Suite à une ordonnance en référé du tribunal administratif de Paris, Nymphomaniac a été interdit au moins de 16 ans au lieu de 12 ans.


Joe (Charlotte Gainsbourg) est recueillie par Seligman (Stellan S.) qui la retrouve blessée au beau milieu de la rue. Les deux personnages se retrouvent chez lui, en tête à tête, et passent toute la nuit à discuter de la nymphomanie de Joe. Elle raconte son vécu sous forme de chapitres. Ils débattent et se redécouvrent eux-mêmes.

Quel est ce film que le réalisateur danois le plus controversé nous balance à la figure ? Le blasphème lui sied parfaitement sans qu’on lui en tienne rigueur. Il nous manipule sans efforts à l’aide de ses nombreuses théories scientifiques et « masturbe » les esprits de sa culture. Un type capable de sortir la pire monstruosité et nous faire acquiescer comme des moutons. Il nous invite au voyeurisme en nous proposant des scènes salaces aux tendances pornographiques.

Comme un Pasolini qui crache au visage d’une société hypocrite en lui livrant Salo et les 120 jours de Sodome.  Fascinant, intéressant, subversif, sans scrupules, Lars Von Trier est un provocateur dans l’âme. Son cinéma mérite notre attention car il est de qualité. Malgré ses pertinents choix artistiques, Lars n’est pas là pour se faire des amis : ça passe ou ça casse.

Nymphomaniac est croustillant d’anecdotes violentes et sexuelles. Pour le réalisateur, Joe n’est qu’un prétexte pour dénoncer la perversité de la société. Traitée comme une dangereuse déviante, Joe déshabille le loup déguisé en agneau, elle réveille les vraies natures et révèle la part sombre qui sommeille en chacun.  Malade et incontrôlable, elle ne peut être perçue comme l’incarnation du mal. Son entourage la maintien dans ce cercle vicieux et lui rejette la faute, incapable d’assumer ses actions.

Nymphomaniac est un film qui force la curiosité et brillant. Autant vous prévenir que ce n’est pas un conte pour les enfants. Le film doit être vu, rien que pour sa « cultissime » séquence avec Uma Thruman. Mettant en question nos responsabilités et notre vigilance, Lars Von Trier tourne une scène faisant écho à l’introduction d’Antichrist. Vous serez constamment ébahis, le derrière scotché à votre chaise. Cette œuvre est la boîte de chocolats (Forrest Gump) : vous ne savez jamais sur quoi vous allez tomber !




Rameau Antoine


jeudi 26 juin 2014

Analyse et Critique - A Touch of Sin de Zhang-Ke Jia


 
Film chinois sorti en salles le 11 décembre 2013 et réalisé par Zhang-ke Jia

Filmographie : Xiao Wu, artisan pickpocket (1997), Platform (2000), Plaisirs Inconnus (2002), The World (2004), Dong (2006), Still Life (2006), Useless (2007), 24 City (2008), I Wish I Knew (2010), A Touch of Sin (2013)

Casting : Jiang Wu, Vivien Li, Luo Lanshan, Wang Baoqiang, Zhang Jia-yi, Zhao Tao.

Nomination : Le film remporte le Prix du Scénario lors du Festival de Cannes de 2013.



A Touch of Sin traduit par « Un soupçon de pêché » se réfère au film A Touch of Zen de King Hu réalisé en 1971. Le film déroule quatre histoires avec quatre personnages diamétralement opposés. Le premier est un ouvrier, le second vit dans les taudis, la troisième travaille dans un salon de massage et le dernier est un jeune en recherche perpétuel d’emploi. Le film s’inspirerait d’évènements réels et se passe dans une Chine assez récente. Le réalisateur créé un univers qui tourne autour du « wuxia » (héros-guerrier ou chevalier martial ou chevalier errant) figure décrite dès le 2e siècle av J-C.

On peut penser que ce film traite du « hors-la-loi », ressemblant en quelque sorte au « western » chinois. Les protagonistes sont chacun en proie à un monde violent, ils sont vagabonds, en quête d’une justice qu’ils appliquent eux-mêmes, par contrainte ou par choix. En déroute, ils semblent sans attaches et errants comme l’indique le terme wuxia. Ils sont à l’image d’un système déjà rude. Si l’on prend en considération les quatre personnages dans l’ensemble du film, il serait sans doute plus exact de les appeler « marginaux » (ou déviants de leur société).

On  s’attend à un quelconque lien entre eux car ils viennent à se croiser deux ou trois fois notamment lors du générique. L’absence de lien entre les personnages nous force à interpréter ces « croisements » différemment. Le film serait construit comme une « course de relais » et ils se transmettent leur violence de façon symbolique : comme si le pêché était transmis du bout du doigt. Ils deviennent chacun leur tour, des chevaliers errants, caractérisés par des attitudes ou des comportements. Il y a peu (voire pas) de musique. Par moment les « héros » ne parlent pas, sont muets. Ils sont dans la continuité du mouvement, sur la fuite, l’égarement. À leur façon ils avancent dans la narration : l’un en tuant ses patrons les uns après les autres, l’autre en étant de passage chez sa famille avant de devoir fuir, l’une après avoir tuée deux hommes et le dernier à la recherche d’un endroit où se sentir à sa place. A Touch of Sin dépeint d’une certaine manière la mentalité et l’atmosphère qui règne en Chine au sein de sa population.

Les personnages encaissent, puis viennent à exploser ne trouvant plus de solution à leur situation. Les quatre protagonistes portent un regard soucieux sur la collectivité et cherchent leur insertion en société. Confrontés à l’échec, ils basculent malgré eux vers le résultat inverse et nous renvoient au sentiment de solitude général.

Zhang-Ke Jia travaille la violence avec intelligence, qui est à la fois un aspect de leur culture et devient une forme d’inquiétude artistique.


L’info en plus : Le réalisateur Nicolas Winding Refn dans son œuvre Only God Forgives, construit le personnage de Julien de la même façon que le wuxia. Dans un monde d’errance, de justice, de silence et de violence.





Rameau Antoine



jeudi 19 juin 2014

No Pain No Gain de Michael Bay (2013)


 
Adaptation à l’écran des trois criminels les plus impensables d’Amérique

 

Michael Bay accro au pur concentré Américain, ne s’est pas fait prier pour réaliser cette histoire tellement improbable et pourtant vraie. Aucune fantaisie de la part des scénaristes, tout était bon à prendre.

Filmographie: Bad Boys (1995), Rock (1996), Armageddon (1998), Pearl Harbor (2001), Bad Boys 2 (2003), The Island (2005), Transformers (2007), Transformers 2 (2009), Transformers 3 (2011), No Pain No Gain (2013), Transformers : l’âge d’extinction (2014), prochainement : Ghost Recon (2014)

 

Il s’appelait Lugo Daniel, un bodybuilder, et il voulait vivre son « rêve américain ». C’est en 1994 à Miami, avec l’aide de ses acolytes (bodybuilder) Jorge Delgado et Noel Doorbal, qu’il décide de kidnapper le businessman argentin Marc Schiller, afin de s’emparer de sa fortune. Ils reportent à plusieurs reprises l’enlèvement avant de trouver la meilleure opportunité. Après le vol de ses biens, ils auraient maintes fois tentés de le tuer sans y parvenir, le laissant dans un sale état. Marc Schiller reconnaît rapidement l’un d’entre eux, suite à l’une de leur discussion. Malgré les nombreuses indiscrétions de Jorge Delgado, ils utilisent à nouveau leur plan en visant Frank Griga un producteur de porno. Le corps brûlé de ce dernier et de sa femme Krisztina Furton sont identifiés grâce au numéro de série des implants mammaires qu’elle portait. Les trois ravisseurs avaient l’intention de les découper à l’aide d’une tronçonneuse. Mais n’arrivant pas à l’allumer, ils ont échangés l’objet en magasin contre une hache. C’est ensuite qu’ils ont brûlés les corps dans un tonneau. Lugo est arrêté aux Bahamas en mai 1995. Il est condamné à mort avec Noel Doorbal après 15 ans de prison. Quant à Jorge Delgado il est libéré au bout de 7 ans au lieu de 15.

No Pain No Gain est complètement décalé, au point de devoir certifier une nouvelle fois dans le film qu’il s’agit d’une histoire vraie. Bien évidemment, certains détails sont rajoutés ou adaptés essentiellement pour la fiction. Marc Schiller, la victime, n’a pas apprécié le ton humoristique employé par le réalisateur alors qu’il a vécu l’enfer. Pourtant il n’y a pas d’autre mot que « stupidité » pour décrire cette affaire. Il écrit le livre Pain and Gain – The Untold Story afin d’éclairer certains points. Il passera un an en prison pour fraude.

L’idée de Lugo lui est venue assez simplement : « j’étais fort, je voulais être comme Tony Montana (Scarface) ». Le personnage avait beau être charismatique, il a fini comme une passoire au fond de sa piscine. Prêt à payer ce prix pour le « rêve américain » ?

 

 

Rameau Antoine
 

lundi 9 juin 2014

Batman Returns de Tim Burton (1992)


Deuxième article sur Le Chevalier Noir rédigé par Teddy Slamani, Bat-Fan et surtout connaisseur de l'univers DC Comics.




Histoire: Tucker et Esther Cobblepot, un couple aristocratique vivant à Gotham City, abandonnent leur enfant Oswald Cobblepot en le balançant dans les égouts par ce qu’ils éprouvent en voyant son physique difforme. 33 ans plus tard, Oswald Cobblepot élevé depuis par des pingouins, fomente une attaque à Gotham lors d’une représentation publique de Max Schrek (un industriel Millionnaire) visant à le kidnapper. Le Pingouin décide de se servir du pouvoir politique de Max Schreck pour refaire surface et s’imposer auprès des citoyens de Gotham. Pour ce faire le Pingouin décide de le faire chanter en le menaçant de dévoiler ses activités criminelles si ce dernier refuse de l’aider.

Le Pingouin élabore un plan visant à faire son entrée au sein de Gotham en tant que héros. Il fait kidnapper le fils du maire pour ensuite le délivrer. De son côté, Bruce Wayne/Batman émet des doutes quant à la sincérité du geste de Cobblepot. Il décide donc d’enquêter sur son passé et établit un lien avec le Gang du Cirque du Triangle Rouge (celui-ci ayant récemment été lié à la disparition d’enfants).

En parallèle, Selina Kyle, secrétaire de Max Schreck, découvre des documents compromettants sur les affaires de Schrek. Ces documents concernent une centrale qui rejette des déchets toxiques. Max Schreck prend Selina en flagrant délit et la défenestre. Laissée pour morte, Selina Kyle survit réanimée par des chats. De cette renaissance naîtra Catwoman, cambrioleuse vêtue d’un costume de chatte noire avec pour principal objectif : se venger de son patron.

Pendant ce temps, Max Shreck cherche à remplacer le maire actuel par le Pingouin, lui permettant d’accroître son pouvoir sur la ville et par la même occasion de concrétiser son projet de centrale électrique. Bruce et Selina se rencontrent et entament une relation amoureuse sans connaître la double identité de l’autre, créant ainsi une situation conflictuelle puisque Catwoman et le Pingouin s’allient pour se débarrasser de Batman en le discréditant et le faisant passer pour ce dont il s’est toujours juré de combattre : un criminel.



Suite au succès du premier opus, on peut parler de phénomène de société. Le Batman de Burton relança l’engouement auprès du personnage, ce qui sera alors appelé la Bat-mania. Rappelons que le film rapporta un peu plus de 400 millions de dollars pour un budget de 35 millions de dollars. Les Studios Warner décidèrent donc de produire un deuxième film, avec encore une fois Tim Burton aux commandes. Il n’était, dans un premier temps, pas d’accord pour réaliser la suite de Batman. D’autant plus que les Studios désiraient inclure Robin (le sidekick de Batman) et ce depuis le premier film alors que Burton a toujours été réticent à l’idée d’inclure ce personnage. Robin sera introduit par la suite dans les adaptations cinématographiques de Batman «dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom» réalisé par Joel Schumacher.

Tim Burton décida entre temps de se consacrer à la réalisation d’un projet beaucoup plus personnel, Edward aux mains d’argent, qui sortira en 1990. La Warner relança le réalisateur en lui proposant cette fois une totale liberté artistique. Burton figure même parmi les producteurs du film. Traumatisé par le tournage du premier opus, il se pencha sur ce projet avec une certaine prudence. Il réalisa ce qui devint l’un de ses films les plus personnels et à mon humble avis l’un de ses meilleurs.

Du côté du casting, on retrouve bien évidemment les mêmes acteurs pour leurs rôles respectifs lors du premier film. Dans les nouveaux nous avons, Michelle Pfeiffer dans le rôle de Selina Kyle/Catwoman, Danny DeVito dans celui du Pingouin/Oswald Cobblepot et Christopher Walken en Max Schrek.


Gotham City

Graphiquement le film est toujours dans la même lignée que le premier opus. Gotham City a entièrement été conçu en Studio avec une touche à la fois plus raffinée et gargantuesque. Dans le premier Batman, Gotham paraissait grisâtre voire rouillée. Ici le film se déroule en hiver, en pleine période de Noël. La ville y est enneigée, une imagerie récurrente chez Burton, qui n’est pas sans rappeler son précédent long métrage, Edwards aux mains d’argent. La ville apparait comme étant littéralement nettoyée des crimes dont elle fut gangrenée. En réalité, la neige apparait comme un voile visant à cacher les maux dont Gotham est affublée. Un élément produit un fort contraste avec la neige qui couvre la ville : le film se situe uniquement de nuit, même quand certaines scènes sont censées se dérouler en plein après-midi. Le premier film s’amusait à brouiller les pistes concernant l’époque de l’histoire. Ici, c’est le temps qui est encore plus encré dans l’univers. Les choix du film brouillent les pistes en nous plongeant dans une réalité aux antipodes de la nôtre.


Catwoman

 
Au début du film, Selina Kyle est représentée comme une secrétaire assez maladroite, qui a du mal à s’exprimer et à exister auprès des autres. Avant sa transformation, elle n’apparaît qu’en arrière-plan et appartient au décor. Une fois ressuscitée, un changement va s’opérer dans sa personnalité. Elle va totalement s’émanciper d’une société ou règne les hommes sous sa forme la plus féminine. Telle une force brute de la nature et indomptable. Elle va se créer un personnage masqué, une nouvelle peau à travers Catwoman, un masque qui ne lui permettra pas de se cacher mais plutôt de laisser ressortir sa vraie nature. Son costume noir, luisant, très sexuel, aux coutures découpant son corps, rappelle à la fois des monstres tels que la créature de Frankenstein, mais aussi l’état d’esprit du personnage. Les coutures représentent à la fois le chaos qui règne dans la tête de Selina Kyle mais aussi les cicatrices causées par les hommes dont elle essaiera de se venger (notamment son patron Max Shreck). Michelle Pfeiffer incarne une Catwoman absolument parfaite, au regard très félin, à l’allure et à la façon de se mouvoir très sensuelle. Notons aussi une alchimie et un jeu de regard assez intense lorsque Bruce Wayne/Batman et Selina Kyle/Catwoman apparaissent ensemble.


Le Pingouin

Oswald Cobblepot alias le Pingouin, représente le monstre que Burton adule, un être abandonné par ses parents, vivant dans les égouts, en marge de la société, élevé par des pingouins, rejeté à cause de son physique et perçu comme n’étant qu’une bête de foire. Celui-ci le dit d’ailleurs dans le film « c’est humain hélas, que de rejeter ce qui est autre ». Il va alors chercher à se faire accepter auprès des citoyens de Gotham à l’aide de Max Schreck. Ce dernier va se servir de lui pour mener une campagne et prouver qu’Oswald Cobblepot « l’homme » est quelqu’un de bien. Pour ce faire, Oswald va alors maquiller ses véritables intentions, ne pouvant se plier aux conventions de la société. Il laissera réapparaître sa nature profonde, sa part d’animalité, d’homme «pingouin», dont la mort rendra son existence d’autant plus pathétique. Sous le costume du Pingouin se cache un Danny DeVito méconnaissable qui incarne le personnage avec beaucoup de sens.


Max Shreck
 
 
Le véritable méchant si l’on regarde sous un autre angle n’est autre que Max Shreck. Il apparait comme étant le plus humain mais s’avère être au fond le véritable monstre. Contrairement au Pingouin, il est accepté au sein de la société, il a l’air sympathique et présente « bien » afin de s’attirer le soutien du peuple. En réalité il s’agit d’un homme d’affaire véreux, sans scrupule, un assassin ne reculant devant rien et n’hésitant pas à corrompre et manipuler son entourage à des fins personnelles. Il se construit une  façade. Toutefois, il n’est pas complètement dénué d’humanité puisqu’il n’hésitera pas à se sacrifier à la place de son fils. On peut noter, que le personnage qu’incarne Christopher Walken est une autre référence à l’Expressionnisme Allemand. Son personnage s’appelle Max Shreck comme l’acteur Allemand Max Schreck qui a joué en 1921 dans Nosferatu.

[Rameau Antoine : Christopher Walken (Max Shreck) ressemble de près à l’acteur Rudolf Klein-Rogge de Metropolis dans lequel il donne vie à Maria l’androïde. Michelle Pfeiffer (Catwoman), par la découpe de son costume est, à la manière de Tim Burton, la création de Max Shreck.]


Batman

 
Et Batman au milieu de tout ça ? Il a toujours l’aura d’un fantôme qui surveille sa ville, tel une bête défendant son territoire. Il est placé sur un même pied d’égalité avec ses ennemis. Cependant il se retrouve vite dépassé par les événements. Dans un monde qu’il ne comprend plus où chacun avance à visage masqué laissant paraître sa vraie nature. Ou au contraire avance à visage découvert cachant leur nature profonde. Il tente de nouer une relation amoureuse avec Selina Kyle, ce qui s’avère impossible à cause de la rivalité qui les anime via leur double identité.



 
Danny Elfman

 
Compositeur attitré de Tim Burton, qui a œuvré dans tous ses films (à l’exception d’Ed Wood et Sweeney Todd), Danny Elfman vient ici parachever les compositions du premier Batman. Il compose un véritable opéra. Les thèmes y sont mémorables pour chacun des protagonistes. Ainsi le thème de Batman y est transcendé grâce à l’utilisation omniprésente de chœurs rappelant Edward aux mains d’argent. Le Pingouin profite d’un thème à l’atmosphère funèbre et pour Catwoman, personnage sinueux et torturé, des musiques portées par une émotion incroyable.





Ainsi vous l’aurez compris, la dualité est l’un des thèmes qui inonde le film. En effet Batman Returns met en exergue la dualité des Hommes à travers l’animalité de chacun. Représentés respectivement par une chauve-souris, un chat et un pingouin. Où chaque personnage cherche à exorciser ses névroses, s’émanciper ou tirer profit de la faiblesse des autres. Plus personne ne sait où il en est quant à sa place dans la société. Le film démontre à travers tous ses personnages qu’il est loin d’être « manichéen » et fait preuve d’une certaine profondeur dans son traitement. Tout n’est pas, soit noir soit blanc, tout y est nuancé. Il y a encore énormément de choses à dire sur ce film tant les thématiques abordées y sont riches en symbolisme. Tim Burton développe en ce sens l’une des œuvres les plus pessimistes, riches et profondes sur le Chevalier Noir. La nature humaine qui hisse le film parmi les meilleures adaptations de Batman, de Super héros est en fait tout simplement l’un de ses plus grands films.



Teddy Slamani


vendredi 30 mai 2014

American Horror Story Coven vs The Lords of Salem


AMERICAN HORROR STORY – L’évènement de Ryan Murphy et Brad Falchuk

« Est-ce que American Horror Story Coven Saison 3 sera à la hauteur des deux premières ? Les Sorcières de Salem en désenchantent certains ».
 

C’est en octobre prochain que sortira le coffret DVD de la troisième saison. Diffusée pour la première fois en 2011 avec AHS (American Horror Story) Murder House puis en 2012 avec AHS Asylum, les créateurs de Nip/Tuk ont réunis 5,5 millions de téléspectateurs américains avec le pilote du troisième volet.

Le public se sent moins conquit par la dernière saison qui ne semble pas autant effrayer et tenir en haleine que les deux précédentes. Ryan Murphy et Brad Falchuk se sont proposés comme les « pères castors » de l’histoire d’horreur. La série Creepshow fonctionnait déjà sur ce principe des petites histoires racontées par l’amusant squelette tenant son livre. Les épisodes Creepshow arrivaient à surprendre et n’étaient pas accessibles à un jeune public. AHS peut être perçue soit comme le plat réchauffé des récits connus qui constituent notre culture fantastique ou bien comme un hommage à l’ensemble de ces histoires, mis en scène à l’aide d’un fil rouge qui rassemble à chaque saison le même casting (ou presque) d’acteurs. L’idée d’AHS est très commercial car ils exploitent de grands classiques de la littérature ou du cinéma : Amityville, L’Exorciste, La Dalhia Noir, Poltergeist, Massacre à la tronçonneuse, A la rencontre du troisième type, Les Sorcières de Salem, Le Sixième Sens, Frankenstein et bien d’autres.

Cette série a pour avantage de se renouveler à chaque saison ce qui lui permet autant de durer, que de s’arrêter si elle ne marche plus. Autrement dit, un projet commercial sans trop de risques sur le long terme.

Puisqu’il faut changer d’histoires à chaque saison, il y a un risque que le téléspectateur soit moins sensible aux derniers choix. Murder House et Asylum mettaient en avant des personnages principaux qui sont devenus victimes de leur environnement. La famille qui emménage dans la maison du premier AHS ne s’attendait pas à toutes ces apparitions et les malades de la saison 2 n’imaginaient pas toutes les expériences qui se passaient au sein de l’asile. La saison 3 est vécu du côté des Sorcières, elles sont donc potentiellement les dangers. La surprise est moins grande. Sans la comparer à la série Charmed ou Buffy, les Sorcières de Salem et la magie vaudou sont des choix qui en valent bien d’autres.

N’oublions pas qu’avec Nip/Tuk les créateurs de la série se laissaient aller à une ambiance complètement déjantée entre humour, gore et sexe. Il faut regarder AHS comme quelque chose d’entièrement décalée, cuisinée à cette sauce qui leur plait tant.

Le plus gênant est d’appeler cette série « American » Horror Story, alors qu’ils s’inspirent également de légendes étrangères comme Le Minotaure. On abandonne cette fois la folie au profit de la magie. Les deux premiers univers étaient probablement plus oppressants, mais il y a tant à exploiter des films de Sorcières. Rosemary’s Baby de Roman Polanski ou Suspiria de Dario Argento sont des films efficaces autour de la sorcellerie. Plus récemment sorti en DVD en octobre 2013, pour ceux qui seraient friands des serviteurs de Satan, le dernier film de Rob Zombie The Lords of Salem un film horreur underground qui en vaut le détour.


Film sorti en DVD en octobre 2013 et réalisé par Rob Zombie.


Filmographie : La Maison des 1000 Morts (2003), The Devil’s Rejects (2005), Halloween (2007), Halloween 2 (2009), The Lords of Salem (2013)

Casting : Sheri Moon Zombie

Rob Zombie a formé le groupe de Metal Punk Psychédélique White Zombie dans les années 80, ils se sont séparés en 1996. Le chanteur musicien a continué de travailler pour la télévision et le cinéma. Son univers s’inspire des films d’horreurs, notamment du film White Zombie avec Béla Lugosi et des grands groupes de hard rock, Metal, trash. Le Satanisme est son sujet favori, qu’il pimente avec un genre porno/violent.

Résumé : En 1692, lors de la chasse aux sorcières de Salem, un groupe de femmes au service de Satan sont capturées et brûlées vives par les Seigneurs de la ville. Avant de mourir elles lancent une malédiction qui touchera les descendants des persécuteurs. Heidi, (la) personnage principal des temps modernes, anime la station de radio WIQZ de Salem. Elle reçoit un jour une boîte mystérieuse contenant un vinyle d’un groupe appelé « The Lords ». En l’écoutant et en la diffusant, la musique agit sur les esprits et provoque de terribles évènements.

Rob Zombie marque le film d’horreur d’un style nouveau qui tourne autour du diable, du rock et d’une image Pop Art. Il use de néons, de costumes et maquillages de scènes, de décors factices qui alimentent l’imaginaire. Cette magie créée à partir de rien et du montage filmique nous renvoie à la chambre d’Heidi, décorée de la célèbre lune de George Méliès et de différents meubles lumineux. Il réutilise également de célèbres plans de films d’horreurs qui placent le réalisateur avant tout comme un fan. Un monde dans la consommation des « masses culturelles », comme Quentin Tarantino s’approprie à sa façon un univers rétro, post moderne.





Rameau Antoine


Batman (1989) de Tim Burton - De la Clarté sur les Zones d'Ombres

 

Il n’était encore qu’un enfant, que le milliardaire Bruce Wayne vit ses parents assassinés. Dès lors il se jura de combattre le crime et l’injustice. De ce traumatisme naquît le chevalier noir Batman, personnification symbolique de la peur de Bruce Wayne, celle des chauves-souris, qu’il souhaite insuffler à ses ennemis. Alors que Batman n’en est qu’à ses balbutiements, le procureur Harvey Dent et le commissaire Gordon mènent une croisade contre la criminalité menée par Carl Grissom, le parrain de la pègre secondé par son bras droit Jack Napier et la corruption qui règne à Gotham. En parallèle, le reporter Alexander Knox et la photojournaliste Vicki Vale enquêtent sur les agissements de Batman, alors que celui-ci n’est pour le moment qu’une sorte de mythe urbain. Grissom envoie Jack Napier et ses hommes de main à l’usine chimique Axis Chemicals pour y récupérer des documents. Mais la police est alertée par Grissom qui a en réalité tout manigancé, celui-ci ayant découvert que Jack Napier entretenait une liaison avec son épouse. S’ensuit une altercation entre la police et les malfaiteurs durant laquelle Batman se retrouve confronté à Jack Napier. Ce dernier évite l’une de ces balles qui ricoche et le défigure. Par la suite tombe dans une cuve d’acide et sera laissé pour mort. De cette confrontation naîtra le Joker. Jack Napier devenu le Joker, physiquement et psychologiquement transformé, sombre dans la folie et décide de se venger de son ancien patron. Par la même occasion il prend les rênes de la criminalité de Gotham et s’ensuit alors un désir de reconnaissance criminelle et médiatique de sa part, dans une lutte effrénée du bien contre le mal entre deux monstres, le fantomatique homme chauve-souris face au clown psychopathe.
 

Voilà pour le résumé du film, maintenant place à une rapide (re)contextualisation des événements qui entourent Batman à travers les média.

Au milieu des années 80, Batman aura subit une véritable résurrection grâce à l’auteur de comics Frank Miller qui aura su replacer le chevalier noir dans un récit à l’esprit plus sombre et torturé. En effet à son lancement en 1939 dans les pages de Detective Comics puis DC Comics (maison d’édition à l’origine d’autres personnages mythiques comme Superman), les auteurs de Batman, Bob Kane et Bill Finger optèrent pour un récit résolument plus mature qu’à l’accoutumé. Mais au fil des années le ton du Comic finira par dévier dut à divers facteurs scénaristiques et de censures, puis s’ensuit une série télévisée populaire avec Adam West dans le rôle-titre, aux allures de comédie, de parodie, ne digèrent au final que trop mal la substance originelle de l’œuvre. Batman connu des hauts et des bas, la crédibilité du justicier masqué se remettra difficilement de l’image de la série. Du côté du cinéma, sortit en 1978 Superman, qui rencontra un tel succès commercial que le projet d’adapter Batman au cinéma fut lancé. Il fut à maintes reprises retardé, remanié, jusqu’à ce que la réalisation soit confiée au jeune réalisateur Tim Burton qui avait déjà su apposer son sens de l’esthétisme avec des longs métrages comme Pee-Wee’s Big Adventure et surtout Beetlejuice.
 

De plus le succès des comics The Dark Knight Returns, Year One de Frank Miller et The Killing Joke d’Alan Moore relanceront non seulement l’engouement autour du personnage à travers des récits plus adulte, à l’atmosphère glauque et ténébreuse, mais auront aussi un impact bénéfique dans la conception du Batman réalisé par Tim Burton. Un processus de réécriture va s’appliquer, passant d’un scénariste à un autre et une équipe technique, chargée de s’occuper des décors, costumes, maquillages et autres accessoires, sera soigneusement sélectionnée afin d’offrir une cohésion par rapport à la sensibilité artistique de Burton. Warner débuta la pré-production en 1988. Lorsque le choix de Michael Keaton fut dévoilé pour incarner Bruce Wayne/Batman, un vent de contestation souffla du côté des fans, ne voyant en cet acteur (ayant au passage interprété Beetlejuice) qu’un potentiel d’acteur comique, craignant que le ton du film ne soit le même que celui de la série des années 60. Burton vit en Keaton tout le potentiel nécessaire dans l’interprétation tourmenté et mystérieuse du personnage principal. Sa décision sera notamment motivée par la capacité de l’acteur à jouer un Bruce Wayne aux différentes facettes nuancées et cette faculté à capter l’attention au travers de son regard si particulier.


Afin d’asseoir une certaine crédibilité auprès du public, les studios imposèrent à Burton le choix d’une star de cinéma, notamment dû à des délais de production un peu court sans que cela n’altère la sève de l’œuvre, plusieurs acteurs seront approchés pour jouer le Joker jusqu’à ce que Jack Nicholson obtienne le rôle. S’ensuit le choix d’autres acteurs secondaires au casting dont Kim Basinger dans le rôle de Vicki Vale, qui sera « castée » au dernier moment, Sean Young dû renoncer au rôle à cause d’une chute à cheval alors qu’elle avait été choisi, Michael Gough dans le rôle de l’inébranlable majordome de Bruce Wayne, Alfred et Billy Dee Williams dans celui du procureur Harvey Dent, etc... . Chers amis, que nos esprits s’épanouissent. Alors qu’en est-il de ce Batman proposé par Burton ? Il marque incontestablement à travers chaque aspect, la griffe du réalisateur, avec son atmosphère gothique et déjantée, sombre et poétique, jouant l’excessivité avec une représentation comique et décalée de la mort. Le film use de différentes techniques convoitées par le réalisateur. L’équipe qui s’est attelée à matérialiser la vision de Burton a clairement du talent et de la créativité à revendre.

 
Pour représenter architecturalement Gotham City, le film s’inspire de divers mouvements arts déco et de l’expressionnisme allemand, notamment du film Metropolis de Fritz Lang, ce qui confère à la ville un certain gigantisme et une identité forte. L’idée fut de proposer un esthétisme rétro-moderne plongeant le film dans sa propre réalité, le rendant de ce fait presque intemporel où les trais y sont tirés pour apporter beaucoup d’expressivité. L’ambiance n’est pas sans rappeler les polars noirs des années 40, même les coups de feu rappellent les bruitages d’époque. Gotham est le berceau du crime et cela se ressent : c’est vaporeux, rouillé, grisonnant, ça suinte et les ruelles sont sinueuses. En parlant d’art, le Joker est défini dans le film comme un artiste fou, marginal qui cherche à imposer à son image sa vision du crime, de la folie et du chaos en apparaissant à chaque fois à travers une mise en scène théâtral. En allant jusqu’à défigurer un visage « fou furieux » à son image au sourire figé. Détruire l’aspect de certaines toiles dans une galerie d’art. Jack Nicholson n’interprète pas le Joker, Jack Nicholson joue Jack Nicholson, il est le Joker.

As-tu déjà dansé avec le diable au clair de Lune ?


Tim Burton apporte plus d’importance au Joker avec sa mise en scène et ses nombreuses apparitions à l’écran qu’il ne le fait avec Batman. Un point décrié par certains, qui s’explique non seulement par le fait que Burton a toujours été plus attiré par les monstres mais aussi parce que Batman n’existe qu’à travers ses ennemis. Il peut être perçu comme un simple faire-valoir mais l’approche de Burton de Batman est juste. Batman agit comme un justicier fantomatique qui n’apparaît que lorsque le mal, qui ronge la ville, l’appelle à répliquer. Le héros n’existerait pas sans criminalité et c’est cela qui motive Bruce Wayne à endosser le rôle du justicier masqué. Il ne se sert au final de ce statut que comme une sorte d’exutoire motivé par la mort de ses parents. Il en arrive à un point où il ne fait plus cela pour soulager son mal être, mais parce que c’est devenu l’intégralité de sa personnalité et de sa vision manichéenne.

-Qui es-tu ?
-Je suis Batman.

Le temps d’apparition de Batman est en ce sens bien dosé. Même si le choix de Michael Keaton s’avère judicieux, celui-ci jouant un « Batman/Bruce Wayne » à la force mentale contenue et mystérieuse, marquant ainsi la dualité de ses différentes facettes psychologiques, il apparaît la plupart du temps en un Bruce Wayne pensif et déconnecté. Il aurait été intéressent d’exploiter un peu plus le ressenti du personnage en extériorisant d’avantage son conflit intérieur. D’autres éléments décriés comme celui d’avoir lié les origines de Batman à celle du Joker (celui-ci ayant tué les parents de Bruce dans le film) me paraissent plutôt censés car à travers le comic, la relation entre les deux protagonistes est symboliquement caractérisée par le fait que l’un n’a pas lieu d’être sans l’autre. Chacun est à l’origine de l’autre, leur raison d’être en est que plus forte et leur confrontation marque chez Bruce Wayne un moyen de faire le deuil.
 

Autre reproche : Batman dans le film tue le Joker ce qui est à priori contradictoire et contestable par rapport à la ligne de conduite du personnage. Mais à l’origine, Batman était un justicier qui utilisait des armes et qui n’hésitait pas à tuer ses ennemis. Le personnage dans les comics a simplement, au fil du temps, été aseptisé afin de respecter une loi visant à moraliser les comics. Cela a permis aux scénaristes de faire réapparaître certains ennemis très appréciés des lecteurs. Du côté des personnages secondaires, la reporter Vicki Vale, qui cherche à en savoir plus sur l’énigme que représente l’homme chauve-souris, donne la touche romantique du film et aussi un point d’entrée à l’intrigue. Elle fait à son désavantage figure « d’élément racolée », cependant le contexte, « emblème métaphorique » de la lutte du bien contre le mal qui s’insinue à la fois dans Gotham et dans l’esprit de ses personnages, utilise des archétypes entendus et cohérents.
 

Le procureur Harvey Dent et le commissaire Gordon sont hélas trop peu exploités dans le film alors que dans le comic ils représentent avec Batman une trinité qui lutte contre la criminalité de Gotham. Ils apparaissent ici de façon anecdotique. Un dernier point concernant la musique composée par Danny Elfman, fidèle compositeur de Tim Burton : ses compositions rendent une véritable claque. Elles viennent illustrer l’aspect ténébreux, grotesque, décalé, parfois burlesque avec une telle excessivité et expressivité, que le thème principal donne déjà le ton avec cette sorte de marche funèbre et militaire dont les mélodies resteront dans l’inconscient collectif et redéfiniront ce que doit être un univers de super héros.

Au final le film réussi ce qu’il entreprend. On peut lui reprocher certains traitements de personnages ou autres facilitées es mais Batman ne manque pas de style. Ce n’est pas le film ultime de Burton, cependant il parvient à en faire un excellent film à l’expression visuelle marquée avec tout le bagage artistique et les thématiques chères au réalisateur. Il récidivera et viendra parachever sa vision du personnage 3 ans plus tard avec Batman Returns qui est une version encore plus personnelle et intense du chevalier noir.




Teddy Slamani





mercredi 28 mai 2014

Analyse et Critique - Maps To The Stars de David Cronenberg


MAPS TO THE STARS – le drame de l’expérience échouée


« Après Cosmopolis, le réalisateur canadien David Cronenberg réitère ses expériences cinématographiques en mettant de nouveaux cobayes dans sa cage. Un savant fou qui façonne ses acteurs en parfaites créatures. Robert Pattinson devient pour David ce que Johnny Depp a souvent été pour Tim Burton, le sujet idéal pour subir toutes les mutations ».


 
Film sorti en salles le 21 mai 2014 et réalisé par David Cronenberg.


Drame – 1h51 (-12 ans). Julianne Moore a remporté le Prix d’Interprétation Féminine au 67e Festival de Cannes.

Filmographie : Stereo (1969), Crimes of the Future (1970), Frissons (1975), Rage (1977), Fast Company (1979), Chromosome 3 (1979), Scanners (1981), Vidéodrome (1981), Dead Zone (1983), La Mouche (1986), Faux-Semblants (1988), Le Festin Nu (1991), M. Butterfly (1993), Crash (1996), eXistenZ (1999), Spider (2002), A History of Violence (2005), Les Promesses de l’Ombre (2007), A Dangerous Method (2011), Cosmopolis (2012), Maps to the Stars (2014)

Casting : Julianne Moore, Mia Wasikowska, Evan Bird, John Cusack, Robert Pattinson.

Résumé : Les membres de la famille Weiss sont célèbres et vivent à Los Angeles dans les sphères Hollywoodiennes. Après de nombreuses années, ils vont être réunis pour la première fois et réveiller de vieux secrets. Stafford Weiss est un psychothérapeute connu, son fils Benjie est une star du cinéma sorti d’une cure de désintoxication et Agatha leur fille réapparaît, libérée de l’hôpital psychiatrique. En parallèle, Havana Segrand une actrice connue et oubliée des écrans, veut jouer dans la nouvelle version du film dans lequel sa mère tenait le rôle principal avant de mourir dans un incendie. 



Ce film s’adresse à ceux qui sont adeptes des cercles vicieux dans lesquels nous découvrons progressivement que les personnages sont liés. Nous suivons tout d’abord des protagonistes qui semblent suivre des chemins différents avant que l’on ne comprenne leur étroite relation. Plus le spectateur en apprend sur eux, plus ce monde de la célébrité vire au cauchemar. Maps to the Stars pourrait être traduit par « Les chemins vers la célébrité » ou « Les chemins vers l’au-delà ». Comme dans Cosmopolis, le réalisateur nous égare dans un monde hors de notre portée, voire même incompréhensible. Un quotidien tellement différent et jonché de rituels inhabituels que l’on se sent perdu dans une dimension complètement déconnectée de la réalité. Cette métaphore, même exagérée, se maintient. Dans son précédent film Cosmopolis, on suit la journée du riche Eric Packer cloitré à bord de sa limousine partant chez son coiffeur pendant que son empire économique s’écroule et que sa vie est menacée. La limousine ressemble à un cercueil prolongeant sa route jusqu’au Purgatoire. Lors de la dernière séquence, Eric Packer est jugé par l’homme dont il a détruit la vie.

Les mises en scènes de Maps to the Stars sont presque mythologiques. Le schéma du cercle qui enferme les personnages au sein d’un drame est assez fréquent au cinéma. David Cronenberg est un artiste qui confine ses personnages au sein d’une expérimentation. Il joue avec les modifications biologiques, organiques et matérielles. Il touche à l’ADN, fusionne le vivant et le non vivant, fait accoupler deux espèces d’une race différente afin d’en soutirer toute la monstruosité. En allant plus loin, on s’aperçoit que le réalisateur mélange consciemment ce qui n’est pas compatible pour analyser la destruction de ses propres univers. Son cinéma d’auteur est l’emprunte d’un cinéma « psycho-horreur » qui lui correspond et qui est identifiable. Ses films s’appuient sur des trucages composés d’une vraie matière, capable de rendre les organismes palpables, suintants, en décomposition ou en putréfaction. Agatha Weiss est brûlée, Benjie souffre de sa désintoxication, Stafford Weiss se sert du spiritualisme pour soigner les gens, Havana entre la dépression et ses passages « scato », désagrège l’image qu’inspire la célébrité faisant d’elle un personnage « pathétique ».

Maps to the Stars est une œuvre que l’on peut rapprocher de Mulholland Drive de David Lynch car ils explorent tous les deux l’envers du décor. Ils déforment à leur façon le rêve « illusoire » créé par Hollywood comme s’il s’agissait d’une allégorie ou d’un Dieu. Sans diaboliser Hollywood, ils donnent la possibilité qu’il s’agisse d’un lieu cauchemardesque. Il y a une sorte de dualité entre rêve et peur qui est mis en scène à travers la schizophrénie des personnages. David Lynch exploite d’avantage le monde des esprits en se servant des lumières tandis que David Cronenberg matérialise la monstruosité.

[SPOIL : On apprend que Stafford et sa femme sont en réalité frère et sœur. Leurs deux enfants qu’ils font passer pour fou, sont nés d’une consanguinité et dans ce cas d’un accouplement « hors normes ». De ce secret est apparu l’instabilité d’Agatha et les évènements tragiques du film. L’intolérance de Stafford change le sens du film. Les enfants ne sont plus les monstres, ils sont nés d’une monstruosité et leur seule présence renvoie au mensonge du père.]

L’érotisme qui occupe une immense place dans la composition des œuvres du cinéaste provoque une forme de dégoût mais aussi une fascination dérangeante. Lorsque Stafford soigne Havana, il prend des positions à connotations sexuelles. Le corps, élément central chez l’artiste, est inévitablement exhibé, mis en action, distillé de sa sueur et de ses phéromones. Dans Crash, les personnages confondent leur peau avec la carrosserie des voitures. Si le réalisateur sait travailler la chair, il sait également rendre chair ce qui est juste matériel.

Il est difficile de donner un verdict définitif à Maps to the Stars. Connaître le parcours de David Cronenberg est un atout dans l’approche du film. En sortant de la salle, impossible de dire « c’était mauvais », « c’était bien ». On dirait plutôt : « qu’est-ce que je viens de regarder ? ». Ce cinéma d’auteur ne risque-t-il pas de devenir excessif au point d’en perdre son public ? Loin d’être sa meilleure œuvre, les fans du réalisateur peuvent courir le voir. Quant aux autres, la nuit porte conseil et la narration mérite d’être décantée.





Rameau Antoine