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jeudi 7 novembre 2013

FAIRECOURT Frissons / Nov-Dec 2013



Retrouvez la programmation de Fairecourt et l'Atelier 142 sur le site: http://www.fairecourt.com/
 
 
 
Il est 20h30 à Clermont de l’Oise, Fairecourt diffuse sa seconde projection après celle de Thourotte du mardi 5 novembre. Le thème de ce mois de novembre et décembre laisse place au frisson avec en programmation sept courts métrages.

La soirée réunie dans le cinéma du Clermontois une dizaine de personnes curieuses et intriguées par cette sélection d’une durée d’1h40 environ.



-La séance débute avec le court métrage Silence (13’45 - 2013) réalisé par Pierre Gil Lecouvey. Emmanuelle Guth (30 ans) et Pierre Gil Lecouvey (38 ans) produisent eux-mêmes leur travail sous le nom de Spook (Emmanuelle) et Gloom (Pierre). Ils ont réalisés un deuxième court métrage Stress-Killer qui a été sélectionné l’année dernière au Festival Coupé court de Bordeaux. Deux étudiants Mélodie et Octave décident de passer la nuit dans la bibliothèque de leur Université. Des phénomènes étranges arrivent. Pierre et Emmanuelle jouent sur l’intensité du son et de la musique pour provoquer le sursaut chez le spectateur. Le métrage construit l’angoisse en alternant silence et sons explosifs. Lorsqu’un personnage se retrouve prisonnier du cadre de la caméra, la visibilité du spectateur est restreinte et l’empêche d’anticiper. Le son explosif déclenche le sursaut lorsque l’angle de la caméra est perturbé par un évènement soudain. Silence défie les interdits et le lieu de la bibliothèque se prête parfaitement à la situation. Comme des enfants pris la main dans le sac, Octave et Mélodie (deux prénoms très sonores), sont punis par l’horreur la plus inattendue. Ce retournement mêle humour et horreur, deux ingrédients que Spook et Gloom se sont déjà appropriés dans Stress-Killer.


-Terminus (4’05 - 2012) de Nikodem Rautszko Panz, produit par Video Graphic, est certes très court mais il fonctionne. La scène se passe dans un wagon de métro et nous avons à faire à trois personnages. Le plus inquiétant des trois semble à l’origine des incidents qui se produisent. Là où Silence exploite le son, Terminus se sert de la lumière pour traduire la force fantomatique présente dans l’histoire. Ce court métrage prouve que l’on peut construire le suspense et nourrir la peur avec très peu de moyens. Les lumières du wagon s’éteignent plongeant les personnages dans le noir. On joue sur des disparitions qui nous permettent de supposer qu’il y a des transferts ou des permutations qui s’effectuent entre les protagonistes. Terminus propose une intrigue simple mais qui mérite sa place au sein de la sélection.




-Saïd (23’ - 2012) réalisé par Valentin Frentzel et Benjamin Rancoule, visite l’univers du zombie et de l’infection. Leur maison de production « 1986 Prod » est associée avec certains labels de la musique ou des artistes tels que La Fouine (Laouni Mouhid) qui est le personnage principal de Saïd. Influencés par le cinéma de Danny Boyle avec 28 jours plus tard, Saïd présente un climat de chaos ou les personnages sont sans cesse en train de fuir. Valentin et Benjamin font le choix d’esthétiser le court métrage en filmant en noir et blanc. L’infecté, forme évoluée du zombie, est un monstre avide de chair capable de pourchasser inlassablement. Les mouvements frénétiques de la caméra permettent de rendre la situation encore plus réelle. Telle une vue subjective, le cameraman court tout en tenant son appareil. Cet effet nous laisse penser que la catastrophe est bien réelle et qu’il en est de la survie des deux artistes de fuir aux côtés de Saïd.



-Tommy (9’ - 2011) est réalisé par Arnold de Parscau et produit par ESRA Bretagne. L’ESRA est l’Ecole Supérieure de Réalisation Audiovisuelle créée en 1972 à Paris et implantée à Nice en 1988 puis à Rennes en 1999. Arnold réalise Tommy dans le cadre de ses études et se fait remarquer par David Lynch qui se sert du court métrage comme clip officiel pour sa chanson « good bye today ». Il obtient grâce à son œuvre le prix Eric JEAN. Tommy est un jeune garçon perturbé par le cocon viscéral de sa famille. Véritable huis clos, la salle à manger ressemblerait à l’intérieur encombré de sa boîte crânienne.  Comme un tableau irréaliste, chaque membre de la famille participe en tant qu’élément actif de la folie de Tommy. C’est probablement cette mise en scène de la folie qui a retenue l’attention de David Lynch. On peut rapprocher la salle à manger dans Tommy avec celle dans le film Inland Empire sorti en salles en 2006. Dans le film de Lynch les protagonistes portent des masques de lapin et semblent enfermés dans leur dimension. Cette dimension construite directement par le studio de cinéma, confine les personnages dans un lieu où habiterait « la mort ». Tommy plonge métaphoriquement dans la folie en introduisant profondément son jouet dans son plat. Le rêve du garçon nous transporte sur les mers brumeuses qui entourent la Bretagne.


Le Cinéma du Clermontois allume ses lumières. C’est l’entracte. Tout le monde se réuni dans l’entrée du cinéma et partage leurs premières impressions autour d’un verre. Les avis sont partagés et les sensibilités différentes. Les spectateurs de Fairecourt rejoignent impatiemment leur siège.



-Rail (20’ – 2009) d’Yvan Georges dit Soudril ouvre la deuxième partie de cette soirée. Yvan a réalisé trois courts métrages : Block (2005) et Rail (2009) qu’il a autoproduit et Le Syndrome de Cushing (2011) avec Heska Productions une société créée en juin 2011 par Cyril Schulmann et Nabil Khouri. Rail présente un personnage qui du statut de victime se dirige vers celui du monstre. Il se métamorphose lorsqu’il prend possession d’une arme. Il cherche à se venger et à enterrer définitivement ses faiblesses. Tel Robert De Niro dans Taxi Driver, le personnage veut se transformer en un individu dangereux et surentraîné. Il répète de nombreux gestes, il modifie son look afin d’inspirer la crainte. Cette transformation le pousse à rejeter tout ce qui lui semble faible, au point d’écraser d’autres victimes selon lui incapables de se défendre. Progressivement l’organisme du protagoniste est affecté, il devient une entité indescriptible tantôt en décomposition, tantôt en pleine mutation. On retrouve l’influence du cinéaste David Cronenberg qui travaille le corps humain en fusionnant l’organique et le matériel. Le personnage ne fait plus qu’un avec le pistolet. Son corps rejette des balles. Il arrache ses ongles comme le fit l’acteur Jeff Goldblum dans La Mouche (1986). On peut faire un parallèle avec le film Existenz (1999) de Cronenberg dans lequel l’acteur Jude Law constitue une arme en se servant des restes d’un plat et en prenant ses dents comme balles. Le personnage de Rail devient l’arme, il perd toute identité et se confond lui-même avec la violence dont il fut victime.



-On continue la soirée Fairecourt avec un deuxième court métrage d’Yvan Georges dit Soudril : Le Syndrome de Cushing (17’ - 2011). Le syndrome de Cushing serait une maladie hormonale aux conséquences psychiatriques. Le personnage de l’intrigue, malade, tente d’échapper à sa situation en s’imaginant dans un autre corps et vivant une autre vie. Cependant son esprit instable perturbe le monde qu’il s’est créé et chavire de nouveau vers la folie. Il rêve de meurtres et de vengeances. Ce syndrome est défini comme un hypercortisolisme chronique. Ceci est dût à un excès de sécrétion d’hormones cortico-surrénalienne. Harvey Cushing décrit ce syndrome en 1932. Il se manifeste chez l’homme par l’apparition d’une obésité chronique de la partie supérieure du corps, des aspects bouffis du visage, des manifestations cutanées, un hirsutisme et des troubles psychologiques variés. Le personnage du court métrage apparaît brièvement de dos au début de l’histoire. Quand nous revenons à lui, on constate comment il a manipulé la réalité pour rendre sa vie « supportable ».



-Nous en arrivons au dernier court métrage de cette soirée frissons avec La Dame Blanche (15’ – 2012) d’Arnaud Baur, produit par Nitrium Films. Arnaud s’est rendu à Lisbonne en octobre 2012 et a visité la ville de Cintra où serait apparue la dame blanche pour la première fois. Malgré toutes les versions qui peuvent exister autour de la légende, le réalisateur reste au plus près de la version originale et reprend simplement le nom américain de la défunte. L’histoire raconte qu’une jeune femme a été renversée par un automobiliste et qu’elle hante depuis les routes ainsi que sa famille. Ceux qui ont la possibilité de la rencontrer ne peuvent détourner leur regard de cette femme. Ils tentent de la suivre jusqu’à ce que la mort ne les emporte. La dame blanche est comparable à une sirène, elle charme, hypnotise ceux qui peuvent la voir et les marque de sa malédiction.


La soirée Fairecourt s’achève. Les spectateurs sortent de la salle satisfaits, donnant leur ultime appréciation. Parmi le public, l’un d’entre eux a assisté pour la première fois à une soirée Fairecourt et prend cette expérience comme une excellente façon d’aborder le cinéma.






RAMEAU Antoine. 

2 commentaires:

  1. Je suis Yvan Georges-dit-soudril, le réalisateur de RAIL et Le SYNDROME DE CUSHING. Merci d'avoir pris le temps de parler des films. Et merci pour le texte de RAIL, d'avoir su aussi bien cerner le film.

    Bonne continuation

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    Réponses
    1. Merci à vous d'avoir pris le temps de lire le texte et de m'avoir communiqué votre appréciation. Les paragraphes sont courts mais j'essaye de synthétiser au mieux.

      Bien à vous.
      I.T

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